jeudi 31 mars 2016

Le Petit Prince - Antoine de Saint-Exupéry - Editions Gallimard

Quatrième de couverture :

«J'ai ainsi vécu seul, sans personne avec qui parler véritablement, jusqu'à une panne dans le désert du Sahara, il y a six ans. Quelque chose s'était cassé dans mon moteur. Et comme je n'avais avec moi ni mécanicien, ni passagers, je me préparai à essayer de réussir, tout seul, une réparation difficile. C'était pour moi une question de vie ou de mort. J'avais à peine de l'eau à boire pour huit jours.
Le premier soir je me suis donc endormi sur le sable à mille milles de toute terre habitée. J'étais bien plus isolé qu'un naufragé sur un radeau au milieu de l'océan. Alors vous imaginez ma surprise, au lever du jour, quand une drôle de petite voix m'a réveillé. Elle disait : ...» 


Mon avis sur le livre :

Alors voilà, à 19 ans, je n'avais toujours pas lu le Petit Prince, honte à moi je dois dire ! C'est parce qu'on me l'a conseillé que je me suis lancée dans ce petit roman de 90 pages aux allures enfantines, tout coloré et illustré de dessins de son auteur, Antoine de Saint-Exupéry. Et je ne peux pas vous cacher que le Petit Prince m'a fait rêver.

On découvre d'abord une plume pas commune, différente, qui s'adresse aux lecteurs, nous implique dans l'histoire, nous plonge dedans dès la première page. On rit dès le début, parce que l'auteur sait nous emporter par son ironie et sa finesse d'esprit. Rien que la dédicace à l'ouverture du livre intrigue : elle s'adresse à un certain Léon Werth, définit comme le meilleur ami de Saint-Exupéry. L'écriture simple, douce, nous transporte. J'ai l'impression parfois de me répéter là-dessus mais pour moi les meilleurs auteurs sont ceux qui savent jouer, harmoniser des mots simples pour les rendre complexes, différents, leur donner un aspect nouveau auquel on ne les aurait jamais associé.

 Je me suis directement attachée aux personnages. Et pourtant, on ne sait rien du narrateur : on ne connait pas son prénom, pas son âge, pas son aspect physique et très peu sa personnalité. C'est comme si l'auteur avait fait le choix de faire disparaître la figure centrale du roman pour mettre en avant toutes les choses qu'il veut nous apprendre dans son livre, par la rencontre du narrateur avec le Petit Prince. Car c'est le Petit Prince qui fait l'histoire, qui apprend à l'adulte la vie : il y a finalement une inversion de la transmission du savoir, et c'est par l'innocence, la fragilité et la spontanéité de l'enfant qu'on comprend toutes ces choses qu'on n'avait pas comprises avant. Le Petit Prince c'est ce petit garçon venu d'une autre planète, qui pose beaucoup de questions mais oublie souvent de répondre à celles qu'on lui pose.
 
Ce livre est cruel, tout simplement parce qu'il dit la vérité. Il est vrai. Et sous des airs de roman pour petits, se cache une leçon de vie, un livre philosophique destiné à l'adulte. C'est ce qui fait la force du roman : son paradoxe. 

J'ai été surprise moi aussi d'apprendre la vie grâce à ce roman. Derrière des images, l'auteur superpose les morales. Tel objet sera telle chose de la vie, et ça, c'est à nous de le deviner. Et chacun apprendra ce qu'il veut apprendre du roman : au final, on y voit tous quelque chose de différent, et c'est ça la magie des mots.

Il est impossible que je finisse ma chronique sans citer des phrases du roman, car c'est la première fois qu'un roman renferme autant de citations faisant écho à ce que je pense.

-"Droit devant soi on ne peut pas aller bien loin" : je vois dans cette citation l'idée qu'une vie ne peut se faire sans obstacles, et que la vie serait bien ennuyeuse si rien, sur notre chemin, ne savait la détourner de devant soi. C'est parce qu'on regarde autour de soi qu'on avance.

-"Les grandes personnes aiment les chiffres. Quand vous leur parlez d'un nouvel ami, elles ne vous questionnent jamais sur l'essentiel" : le roman en lui-même est une critique du passage à l'âge adulte, car adulte on oublie l'essentiel et on perd l'imagination qu'on avait enfant. Sauf si on apprend à la cultiver.

-Saint-Exupéry lui-même écrit l'importance de son roman : "Car je n'aime pas qu'on lise mon livre à la légère. [...] C'est triste d'oublier un ami. Tout le monde n'a pas eu un ami". Il met en avant la rareté de l'amitié, dans sa difficulté à la trouver.

-"C'est tellement mystérieux, le pays des larmes."

-"J'aurais dû la juger sur les actes et non sur les mots."

-"Il est bien plus difficile de se juger soi-même que de juger autrui." 

-"On ne connaît que les choses que l'on apprivoise."

-"On ne voit bien qu'avec le cœur. L'essentiel est invisible pour les yeux."

J'ai juste une chose à dire : lisez ce roman !

Ma note :

5/5. C'est un coup de cœur.

samedi 26 mars 2016

La grammaire est une chanson douce - Erik Orsenna - Editions Le Livre de Poche

Quatrième de couverture :

«Elle était là, immobile sur son lit, la petite phrase bien connue, trop connue : Je t'aime.
Trois mots maigres et pâles, si pâles. Les sept lettres ressortaient à peine sur la blancheur des draps.

Il me sembla qu'elle nous souriait, la petite phrase.

Il me sembla qu'elle nous parlait :

- Je suis un peu fatiguée. Il paraît que j'ai trop travaillé. Il faut que je me repose.

- Allons, allons, Je t'aime, lui répondit Monsieur Henri, je te connais. Depuis le temps que tu existes. Tu es solide. Quelques jours de repos et tu seras sur pied. Monsieur Henri était aussi bouleversé que moi.

Tout le monde dit et répète "Je t'aime". Il faut faire attention aux mots. Ne pas les répéter à tout bout de champ. Ni les employer à tort et à travers, les uns pour les autres, en racontant des mensonges. Autrement, les mots s'usent. Et parfois, il est trop tard pour les sauver.»


Mon avis sur le livre :

Ce livre il est tombé par hasard sur mon chemin, et je dois dire que j'aime beaucoup quand ce genre de choses m'arrivent avec la lecture. C'est Élise de la chaîne YouTube Les lectures d’Élise (ici) qui en a parlé dernièrement dans une vidéo, qui m'a tellement convaincue, que j'ai foncé emprunter ce livre à la bibliothèque. J'ai eu raison de l'écouter car j'ai adoré ce petit roman de 150 pages

Cet auteur je ne l'avais jamais lu et je crois aujourd’hui que c'est une grosse erreur de ma part, c'est le genre d'auteur qu'il faut lire une fois dans sa vie, absolument. La particularité de son roman est qu'il nous fait découvrir la grammaire de façon ludique, à travers une fiction, s'adressant à la fois aux jeunes mais aussi aux plus âgées.

On rencontre Jeanne et Thomas, deux enfants, frère et sœur, de 11 ans, qui doivent partir en voyage pour rejoindre un de leurs parents en Amérique. Malheureusement, une tempête touche le bateau dans lequel ils se trouvent, celui-ci coule et ils se retrouvent sur une île bien étrange, aux aspects magiques. Traumatisés de l'accident, ils ne peuvent plus parler mais vont réapprendre les mots grâce aux habitants de l'île où ils ont échoué. On découvre diverses personnages, unique, et des lieux où les mots sont matériels comme nous. L'auteur crée un monde imagé où des choses immatérielles existent, vivent, ont des sentiments, ressentent des choses, comme nous. Le petit plus du livre c'est qu'on a de jolies illustrations qui accompagnent la lecture.

J'ai énormément aimé le style de l'écrivain : il est poétique, plein d'humour mais aussi de beauté. Il sait dire avec peu de mots ce que nombre d'auteurs ne savent écrire. Ces messages sont touchants, renvoient à notre vie de tout les jours, nous met une belle claque quoi ! C'est une leçon de vie ce petit livre, toute en finesse, toute en dynamisme, avec peu de passages descriptifs afin de laisser notre imagination se développer sans bornes. On apprend des choses sans s'en rendre compte, c'est comme si l'auteur semait de la connaissance dans ses pages et que nous les récoltions petit à petit au fil de la lecture. 

On referme le livre et on a envie de le relire. Parce que l'écrivain nous rappelle ce qu'on oublie parfois : l'importance des mots. Savoir les utiliser à bon escient, réfléchir avant de parler. Chaque mot a sa spécificité, un sens et pour le comprendre chacun se l'approprie à sa manière. Accepter aussi qu'il y ait tant de mots et qu'on ne puisse pas tous les connaître. 

Je finis donc ma chronique sur les mots de l'auteur, deux extraits du roman qui pour moi sont tellement justes et vrais :

"Les vrais amis des phrases sont comme les fabricants de colliers. Ils enfilent des perles et de l'or. Mais les mots ne sont pas seulement beaux. Ils disent la vérité."

"-... Je t'aime. Tout le monde dit et répète "je t'aime". Tu te souviens du marché ? Il faut faire attention aux mots. Ne pas les répéter à tout bout de champ. Ni les employer à tort et à travers, les uns pour les autres, en racontant des mensonges. Autrement, les mots s'usent. Et parfois, il est trop tard pour les sauver."

Ma note :

5/5. Un livre magique.

dimanche 13 mars 2016

Les montagnes hallucinées - H.P. Lovecraft - Editions Mnémos

Quatrième de couverture :

En quelques nouvelles d’une belle densité, H.P. Lovecraft (1890- 1937) a posé les fondations d’une grande partie de la littérature fantastique et horrifique contemporaine.
C’est avec L’Appel de Cthulhu que l’écrivain atteignit la célébrité posthume et créa la seule mythologie littéraire moderne que l'Amérique apporta au monde.
Avec la traduction fidèle et novatrice de David Camus, notre premier recueil Les Montagnes Hallucinées révéla pleinement le génie littéraire et poétique de H.P. Lovecraft. Cette édition a été saluée à la fois par la critique et le public.
Dans Les Montagnes hallucinées et autres récits d’exploration, le traducteur se fait aventurier et guide pour nous amener au plus près des textes majeurs de cette littérature de l’inquiétude cosmique. Ce nouveau recueil regroupe les six histoires se déroulant sur toute la planète et qui mettent en jeu, entre autres, les sombres manigances de Cthulhu, la déité endormie rêvant à la destruction de l’humanité.


Mon avis sur le recueil :

Je dois dire que j'avais depuis longtemps envie de découvrir cet auteur qui m'intriguait rien que par son nom de famille, oui oui ! Je trouvais que le "love" qui rappelait l'amour en anglais contrastait beaucoup avec la sonorité finale de son nom "craft", plus rapeuse : essayez de le prononcer, vous verrez. Et puis j'avais entendu de très bons avis dessus, et moi qui lit rarement de la science-fiction je me suis dit pourquoi pas !

Je me suis donc plongée par hasard dans ce recueil de six nouvelles portant sur le voyage dans divers lieux : Pacifique, Sahara, Antarctique... On est plongé dans un monde qui nous semble totalement différent et pourtant qui est le notre. On suit toujours un personnage qui parle de son histoire, employant le "je", ce qui rend le récit assez immersif. On n'en sait jamais plus sur lui, ce qui laisse un côté mystérieux.

J'ai d'abord énormément aimé découvrir le style de l'auteur car il a une plume vraiment unique : il décrit en détails tous les éléments, avec la minutie d'un scientifique qui n'en est pourtant pas un. Il invente même ses propres mots, sa propre façon de parler et de s'exprimer, ce qui est assez déroutant au début mais plaisant par la suite.

Malheureusement, et c'est là où j'ai bloqué avec l'auteur, il ne fait que décrire, décrire, décrire. On a aucun dialogue. Et cela ne m'aurait pas gêné si les nouvelles avaient été moins longues. Pourtant, en commençant la cinquième nouvelle nommée Les Montagnes Hallucinées, j'ai cru que j'allais avoir un coup de cœur : le récit commençait de façon rythmé, il était angoissant et faisait froid dans le dos. Et puis à la moitié de la nouvelle, j'ai déchanté car le récit se faisait long, beaucoup trop long et il rentrait trop dans le détail de la description, du coup je n'avais plus peur et je m'ennuyais dans ma lecture. J'ai posé pendant une semaine et demi le recueil avant de le reprendre. Je n'ai pas lu la sixième nouvelle car je ne m'en sentais pas le courage, je n'avais plus envie de lire du Lovecraft. 

J'ai beaucoup apprécié la préface du traducteur au début de livre, qui permet vraiment de comprendre dans quoi on se lance quand on lit du Lovecraft : c'était un auteur qui par ses histoires effrayantes montrait que le plus grand danger pour l'homme était lui-même par sa curiosité. 

Je ressors donc complètement mitigée de ma lecture : 5 nouvelles lues sur 6, il m'a manqué un truc pour accrocher totalement. Malgré tout je reconnais le talent de l'auteur qui est impressionnant, c'est un écrivain unique à découvrir quand même, mais je pense tout doucement, c'est-à-dire qu'il faut lire ses nouvelles de façon espacée. Je finirais sur une phrase de Lovecraft qui pour moi décrit complètement son écriture : "Tout ce que j'ai écrit, je l'ai d'abord rêvé". On a effectivement l'impression d'être dans un rêve en le lisant, voir un cauchemar parfois.  

Ma note :

3/5. Mitigée.